Jadis, un étudiant devait avoir une moyenne de 12/20 pour réussir. Ça c'était avant (voir « La réussite à 10 »). J'ai déjà dit que la marge de manœuvre lorsque je cote s'était réduite de moitié lors de l'adoption du décret paysage (voir « Le décret paysage, deuxième »). Qu'en est-il des points de balance ?

Actuellement un étudiant ayant une moyenne de 12/20 peut bénéficier de cadeaux (automatiques ou pas) et réussir son année avec un 8/20 … ou deux … voire plus en fonction de l'établissement. Cette habitude de faire des cadeaux vient du fait que, la moyenne étant à 12/20, on accepte généralement qu'un étudiant aie un échec dans un cours. Cet échec est compensé. Cette habitude est également bien pratique pour donner un signal à un étudiant.

— Je trouve que tu n'as pas les acquis minimaux dans ce cours mais, si c'est le seul, je ne veux pas t'arrêter.

Cet accident sera visible sur le bulletin de l'étudiant. Un employeur potentiel pourra voir sur le bulletin que l'étudiant en question est « moins bon »1 dans ce domaine. Ce qui ne veut pas dire qu'il le restera toute sa carrière.

Puis vient le décret paysage (ou décret Marcourt) et ça discute dans les salles de profs ! Il y a ceux qui trouvent qu'une moyenne de 10/20, c'est pas grand chose et que ça ne nécessite plus que l'on accorde des points de balance. Le cadeau est déjà fait. Et il y a ceux qui veulent encore pardonner un accident en octroyant des points de balance … si l'accident est « compensé ».

Le soucis, c'est que la notion d'année fond jusqu'à disparaitre et que l'arrivée des UE (unité d'enseignement) va cacher les cotes des AA (activités d'enseignement).

D'une situation d'une douzaine de cours dont la moyenne devait être supérieure à 12/20, on arrive à une situation de 6,7 UE qui doivent chacune valoir 10 ! La moyenne n'aura d'intérêt que lors de l'attribution du grade … en fin de cursus.

Ce n'est donc pas un petit changement, c'est radicalement différent !

Avant Marcourt, donner un 9/20 c'était plus que probablement permettre à l'étudiant de passer (au pire en R48). Après Bologne que signifie un 9/20 ?2

Un 9/20 pour une UE signifie que l'UE n'est pas acquise. Il faut la recommencer.

Le grand jury peut décider de remonter la cote à 10/20 s'il le désire. Dans quelles conditions sera ce grand jury pour faire ce choix.

  • Il est fort probable que le jury n'aura pas d'emblée connaissance des cotes des AA constitutives de l'UE3.
  • Si le grand jury remonte la cote, il s'agit bien de transformer le 9 (ou 8,7, …) en 10. Le 9/20 disparait et ne sera plus visible, ce n'est plus un signal donné à l'étudiant.
  • En cas de vote, il y aura une voix par UE (et pas par AA constituant l'UE), ce qui devrait demander une concertation des profs donnant les AA dans l'UE à cet étudiant … ou pas. Le vote sera secret car c'est un « vote de personne ».
  • Certains ne se sentiront pas respecté si le grand jury remet leur cote en question.
  • Il n'y a que très peu d'UE, il n'y aurait donc à ce niveau que très peu de points de balance. En janvier par exemple, sur 3,4 UE, il sera difficile d'accorder des points de balance sur base de l'évolution favorable de l'étudiant.

Je m'imagine plutôt un grand jury actant les UE réussies et les UE ratées. Il aura déjà pas mal à faire avec la valorisation des crédits et la gestion des équivalences.

Si le grand jury n'octroie pas de points de balance, que se passera-t-il au sein d'une UE ?

Et c'est plutôt là que la discussion semble prendre place.

Cas de figure #1

Une AA au sein d'une UE est finalement semblable à un chapitre d'un cours. En ce sens, il suffit de calculer la moyenne pondérée et permettre de faire l'impasse sur un chapitre … donc sur une AA.

Pratique pour l'étudiant, pas cool pour le prof qui donne une AA faiblement pondérée … il peut rester à la maison !

Possibilité de faire l'impasse sur une AA mais il faut atteindre une moyenne de 10.

Cas de figure #2

Une AA est comme un cours et les UE sont comme des « petites années » qui justifient une délibé de la part des profs qui donnent cours dans l'UE.

Il n'est pas possible de faire l'impasse sur une AA et l'on peut envisager d'autoriser des points de balance. Dans ce cas, il risque d'y avoir plus de points de balance « dans l'ensemble ».

Cas de figure #3

On ne s'embarrasse plus d'octroyer des points de balance et on impose le seuil (cher au décret) de 10/20. La cote de l'UE est la moyenne pondérée si chaque cote d'AA est >10 sinon, c'est la plus petite des cotes.

Cela implique que la manière de coter doit changer. Dès lors que j'estime (dans une AA) que les acquis minimaux ne sont pas acquis, je mets <10 et je sais que l'UE ne sera pas accordée.

Si je ne veux pas que l'étudiant soit arrêté (pour cette UE), ma cote doit être supérieure à 10.

L'idée, dans cette optique, c'est que toutes les épreuves soient intégrées4 … et je pense que c'est là que le décret veut nous mener … ce qui ne va pas être simple car ça doit faire évoluer les mentalités.

D'ici là, discutons, argumentons … essayons de trouver un accord … tout en faisant confiance aux enseignants dont un des objectifs est de permettre à l'étudiant sortant de trouver sa place sur le marché du travail.

À réfléchir …


Crédit photo chez DeviantArt par SeeSaw


  1. Comprendre que le prof estime qu'il n'a pas les acquis minimaux (au temps t). 

  2. Avant Marcourt, après Bologne, il faut suivre hein ! Je répète. Jusqu'en 2013-2014 l'enseignement tombe sous le coup du décret Bologne. À partir de 2014-2015, c'est le décret paysage (aussi appelé décret Marcourt) qui fait loi … pour les étudiants de première. Les autres étant (plus ou moins parce que la réussite à 10 est acquises) mangé à la sauce avec laquelle ils ont été nappés ! 

  3. Je sais que c'est en discussion au niveau de certains développeurs de logiciel de gestion de cote des étudiants … mais pour l'instant, rien n'est décidé. Je vois mal faire circuler le détail de chaque UE pour tous les étudiants, semplement pour accorder l'un ou l'autre point de balance. 

  4. Épreuve intégrée signifie que les profs interrogent pour toutes les AA d'une UE en même temps et produisent ensemble la cote de l'UE.